Tout est calme sur le pont. Les conversations du départ laissent rapidement place au seul chuintement de la brise gonflant la voile, nous faisant glisser en silence sur le calme miroir de l’eau du Nil. Moment divin où chacun profite de ne rien faire sauf, et c’est déjà beaucoup, contempler l’imperceptible déclin du jour sur les rives du fleuve. Idéal, ce voyage au rythme lent permet de s’acclimater en douceur au confort de la vie orientale, que l’on ressent tout de suite en montant à bord. Le Lazuli laisse doucement s’éloigner les rives d’Esna, son port d’attache. En quelques jours de navigation, nous découvrons la Haute-égypte, visitant ses sites archéologiques majeurs mais traversant aussi de petites villes à l’écart des itinéraires classiques. Un périple à la rencontre des paysans d’aujourd’hui travaillant sur les rives du Nil mais aussi de leur histoire : une civilisation faite de beauté, de poésie, de raffinement et parfois de modernité. Tel un voyage initiatique, cette croisière nous conduira jusqu’à Assouan « la douce », au gré du vent, notre felouque naviguant à la voile.
Les six cabines de ce bateau ancien, entièrement rénové, sont toutes équipées de salles d’eau, petites mais confortables. Rien ne manque : lavabo, toilettes et douche. Du luxe lorsque l’on navigue à la voile ! Partout chaleureux, le décor reste chic et sobre. Les repas, cuisinés à bord par le chef et extrêmement variés, sont servis sur le pont si la température le permet, petit déjeuner compris : au petit matin, sur le pont, le spectacle de la vie qui s’éveille sur le Nil est grandiose. L’équipage ne sait que faire pour distiller les instants de bonheur : thé raffiné et café oriental escortés de petites douceurs succèdent aux jus de fruits frais présentés en cocktails vitaminés… Sur le pont chacun vient lézarder, lire, discuter ou écouter de la musique, mollement allongé sur les sofas ou bien calé dans sa chaise longue, selon l’heure et l’envie.
La croisière sait alterner les plaisirs, d’une balade pédestre jusque dans le désert pour y admirer le soleil couchant jusqu’au dîner aux chandelles servi sur la rive du fleuve, en rase campagne, à la nuit tombée. L’équipage ne ménage pas sa peine pour nous rendre chaque instant qui passe plus sublime que le précédent. Notre guide égyptien, francophone, met à profit le temps de navigation pour commenter les visites qui nous attendent à terre : aussitôt débarqués, aussitôt dans le vif du sujet pour découvrir temples, tombes et fresques, parfois d’une fraîcheur telle que l’on oublie les millénaires qui nous séparent des artistes les ayant exécutées. éclairées par un agréable soleil chaud, les falaises de Silsila et les merveilles de Kom Ombo nous attendent, le somptueux ensemble d’Edfou se détache sur un ciel d’azur… Entre escapades à terre et paisible navigation, un programme hors du temps qui dépayse à coup sûr et dont on garde des souvenirs inoubliables.
Vous avez dit « dahabieh » ?
Conçus au xixe siècle et inspirés des barques sacrées des pharaons, ces navires à deux voiles latines transportaient sur le Nil les pachas, seigneurs locaux de l’époque. Les archéologues et leurs équipes tout comme les premiers touristes de Thomas Cook, érudits amateurs de pierres millénaires, voyageaient à leur bord. Ces navires font à présent l’objet d’une restauration complète. Le confort moderne règne à bord, agrémenté d’une décoration raffinée, faisant de ces bateaux le lieu idéal de croisières intimistes. Et en l’absence de vent, me direz-vous ? L’armateur a tout prévu. L’embarcation est tractée, à bonne distance, par un petit remorqueur à moteur qui se tient toujours dans les parages. Mais oui, le bonheur existe.